Comment commencer un potager en permaculture : quelques conseils pour débuter sans se planter
Vous en avez assez des tomates qui ne poussent pas et des courgettes qui fondent du jour au lendemain ?
La permaculture pourrait bien être la solution que vous cherchez ! Contrairement au jardinage traditionnel qui fait de la lutte contre la nature son mantra, cette approche travaille avec elle pour créer un potager productif et résilient.
Qu'est-ce que la permaculture, concrètement ?
Oubliez les définitions compliquées. La permaculture, c'est jardiner en s'inspirant de ce que fait la nature depuis des millions d'années. Dans une forêt, personne n'arrose, ne fertilise ou ne désherbe - pourtant tout pousse parfaitement bien.
L'idée ? Créer un écosystème où les plantes s'entraident plutôt que de se concurrencer : vos tomates protègent vos basilics des pucerons, vos haricots nourrissent la terre en azote, et vos fleurs attirent les insectes qui mangent les parasites.
Les trois principes de base :
· Prendre soin de la terre (pas de recours aux pesticides et aux poisons, nourrir son sol)
· Prendre soin des humains (produire sa propre nourriture saine)
· Partager équitablement (redistribuer les surplus)
Étape 1 : Observez avant d'agir
Avant de foncer bêche en main, prenez le temps d'observer votre terrain. C'est le secret des permaculteurs expérimentés : ils passent une saison entière à regarder avant de planter quoi que ce soit.
Ce qu'il faut noter :
· La zone la plus ensoleillée (c’est là que vous planterez vos tomates)
· Les endroits qui restent humides après la pluie (lieux d’épanouissement des légumes-feuilles)
· L’origine des vents dominants (vous planterez peut-être une haie)
· La nature de votre sol (compact, sableux, argileux ?)
Cette étape peut sembler longue et fastidieuse, mais elle vous évitera des erreurs coûteuses !
Étape 2 : Créer des zones selon vos besoins
En permaculture, on organise l'espace par zones d'intensité. Plus c'est proche de la maison, plus ça demande d'attention.
Zone 1 (0-10m de la maison) : c’est là que vont vos herbes fraîches quotidiennes (basilic, persil, thym, estragon, ciboulette). Vous les cueillez en sortant de la cuisine.
Zone 2 (10-50m) : le potager principal avec vos légumes de base (tomates, courgettes, salades, carottes). Vous y passez plusieurs fois par semaine pour l’entretenir.
Zone 3 (50m+) : les cultures moins exigeantes (courges qui s'étalent, maïs, haricots). Un entretien mensuel est suffisant.
Cette organisation vous fait gagner un temps fou. Plus besoin de traverser tout le terrain pour cueillir du basilic pour vos pâtes !
Étape 3 : Nourrir le sol plutôt que les plantes
Voici où la permaculture change vraiment la donne. Au lieu de nourrir directement les plantes avec des engrais, on nourrit la vie du sol qui, elle, va nourrir les plantes.
La technique de la lasagne (sans les pâtes !) Pas besoin de retourner la terre. Vous construisez votre sol par couches successives, comme une lasagne :
· Des feuilles mortes et/ou de la paille pour étouffer l’herbe et amener du carbone
· Des déchets de cuisine et de tontes fraîches pour apporter de l’azote
· Un peu de terre par-dessus
Et on recommence.
Au bout de 6 mois, vous avez une terre noire, grumeleuse et pleine de vers. C'est magique !
Le paillis, votre meilleur ami. Recouvrez TOUJOURS votre sol. Dans la nature, la terre nue n'existe pas. Paille, feuilles mortes, tontes séchées - tout est bon. Ça supprime 90% des « mauvaises herbes » et garde l'humidité.
Étape 4 : Choisir les bonnes plantes pour débuter
Commencez simple ! Voici les légumes en permaculture les plus faciles pour débuter :
Les valeurs sûres :
· Radis et roquette : 30 jours de la graine à l’assiette
· Courgettes : un plant peut nourrir une famille tout l’été
· Haricots verts : ils enrichissent même le sol en azote
· Épinards : poussent au printemps ET en automne
Les associations qui marchent vraiment
· Tomates + basilic : aussi bon en association au potager que dans l’assiette ! Les tomates aiment les sols secs, le basilic aime l’eau et repousse les aleurodes (mouches blanches) qui se nourrissent de la sève des plantes
· Carottes + poireaux : leurs odeurs se protègent mutuellement des parasites
· Haricots + maïs + courges : La fameuse association des « Trois Sœurs » des populations autochtones. Le maïs fournit les tiges sur lesquels les haricots grimpent et les grandes feuilles des courges, en ombrageant le sol, aident à garder le sol humide tout en empêchant la prolifération des mauvaises herbes.
Étape 5 : Gérer l'eau intelligemment
L'eau, c'est la vie de votre jardin en permaculture. Mais pas besoin d'arroser comme un fou si vous vous y prenez bien.
Récupérer l'eau de pluie : un toit de 540 pieds carrés peut collecter 30 000 litres par an au Québec ! Une cuve de 1000L vous donne déjà une belle autonomie.
Le paillage : on en a parlé, mais c'est tellement important. 10cm de paille autour de vos plants et vous divisez vos arrosages par deux.
Planter des "éponges" : certaines plantes retiennent l'eau dans le sol. La consoude, par exemple, a des racines qui descendent chercher l'eau profonde et la remontent vers la surface.
Spécial Québec : Adapter au climat nordique
Ici, notre saison de jardinage est courte mais intense. Voici comment l'optimiser :
Prolonger la saison :
· Tunnels en plastique transparent dès le mois de mars
· Paillis foncé pour réchauffer le sol plus vite
· Variétés précoces et tardives pour étaler les récoltes
Préparer l'hiver :
· Laisser les tiges creuses (tournesol, topinambour) dans le sol pour les insectes bénéfiques
· Pailler épais (environ un pied) pour protéger les vivaces
· Planter de l’ail en octobre pour une récolte l’été suivant
Les erreurs de débutant à éviter
Voir trop grand : mieux vaut 200 pieds carrés biens entretenus que 1000 à l'abandon. Allez-y petit à petit et agrandissez progressivement.
Vouloir tout contrôler : acceptez qu'une partie de votre récolte nourrisse les oiseaux et les insectes.
C'est le prix d'un écosystème équilibré.
Négliger le sol : si vos plantes ont l'air malades, regardez d'abord sous terre. Un sol vivant = des plantes résistantes.
Abandonner trop vite : la permaculture demande un bon 2-3 ans pour s'installer. La première année, vous apprenez. La deuxième, ça commence à bien marcher. La troisième, c'est le paradis !
Et maintenant ?
Votre potager en permaculture ne va pas se transformer du jour au lendemain, et c'est parfait comme ça. Commencez petit, observez ce qui fonctionne chez vous, et ajustez au fur et à mesure.
Le plus beau dans tout ça ? Dans quelques années, vous aurez créé un petit écosystème qui travaille pour vous. Moins d'arrosage, moins de désherbage, plus de biodiversité et des légumes qui ont du goût.
La permaculture, ce n'est pas juste une façon de jardiner - c'est une façon de voir le monde différemment. Une fois qu'on a goûté à cette harmonie avec la nature, difficile de revenir en arrière.